La Médiatrice de l'Union européenne critique sévèrement la gestion d'Ursula von der Leyen

Emily O'Reilly, Médiatrice de l'Union européenne, a récemment formulé des accusations graves à l'encontre de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Ces critiques, qui soulignent un manque de transparence et des pratiques administratives controversées, mettent en lumière des dysfonctionnements dans la gouvernance de l’Union européenne. Retour sur une affaire qui secoue les institutions européennes.

12/22/20244 min temps de lecture

Les origines de la controverse : le "Pfizergate"

Les accusations portées contre Ursula von der Leyen trouvent leur origine dans une série de révélations connues sous le nom de "Pfizergate". En 2021, plusieurs médias ont rapporté que des négociations cruciales entre l'Union européenne et le géant pharmaceutique Pfizer s'étaient déroulées via des échanges privés entre Mme von der Leyen et Albert Bourla, PDG de Pfizer. Ces messages, qui concernaient des contrats de plusieurs milliards d’euros pour l’achat de vaccins contre la Covid-19, auraient dû être soumis aux règles strictes de transparence et d'archivage imposées aux institutions européennes.

Cependant, la Commission européenne a refusé de divulguer ces échanges, affirmant que les SMS n'étaient pas considérés comme des "documents pertinents" au regard de la législation européenne. Cette position a provoqué une onde de choc, suscitant des interrogations sur l'intégrité et la responsabilité de la gestion de l'Union.

Les reproches de la Médiatrice européenne

Emily O'Reilly, dont le rôle est de surveiller le bon fonctionnement des institutions européennes, a qualifié cette rétention d'information de "mauvaise administration". Elle a appelé Ursula von der Leyen à ordonner une recherche approfondie des messages concernés, estimant que leur disparition ou leur non-divulgation constituait une violation des principes de transparence.

Dans une déclaration percutante, O'Reilly a dénoncé une "culture quasi-mafieuse" qui imprégnerait les pratiques administratives sous la direction de von der Leyen. Selon elle, cette culture repose sur une concentration excessive du pouvoir, un manque de transparence et une incapacité à répondre de manière satisfaisante aux demandes de clarification des citoyens et des organes de contrôle.

Un précédent préoccupant pour l'Union européenne

L’affaire soulève des questions plus larges sur la gouvernance au sein de l’Union européenne. La gestion des contrats de vaccins, dans un contexte de crise sanitaire, est certes un dossier sensible, mais les règles en matière de transparence et d’archivage doivent être respectées pour garantir la confiance des citoyens.

Ce n’est pas la première fois que von der Leyen est critiquée pour des questions de gestion administrative. Avant son poste à Bruxelles, elle avait été mise en cause pour des irrégularités financières lors de son mandat au ministère de la Défense en Allemagne. Ces controverses récurrentes alimentent les critiques sur son leadership.

Les réactions politiques et institutionnelles

Les accusations d'Emily O'Reilly ont déclenché des réactions variées au sein du paysage politique européen. Certains députés du Parlement européen ont appelé à une enquête approfondie pour faire la lumière sur cette affaire. Des membres des partis eurosceptiques n’ont pas hésité à s’emparer de cette controverse pour renforcer leurs critiques à l’égard des institutions européennes, qu’ils jugent éloignées des préoccupations des citoyens.

Cependant, Ursula von der Leyen conserve des soutiens solides parmi les États membres les plus influents de l'Union, notamment l'Allemagne et la France, qui saluent son leadership face aux crises successives. Pour ses défenseurs, la gestion controversée de certains dossiers ne doit pas occulter les succès de sa présidence, notamment la mise en œuvre du plan de relance post-Covid ou encore sa fermeté face à la guerre en Ukraine.

Enjeux et perspectives : restaurer la confiance

L'affaire "Pfizergate" met en lumière une tension fondamentale au cœur des institutions européennes : comment concilier efficacité dans la prise de décision, en particulier en temps de crise, avec les exigences de transparence et de redevabilité démocratique ?

Pour Emily O'Reilly, il est impératif que l'Union européenne réforme ses mécanismes de gouvernance afin d'éviter que de telles polémiques ne se reproduisent. Parmi les pistes évoquées, elle suggère de renforcer les règles d'archivage des communications officielles, de clarifier les responsabilités des hauts fonctionnaires et de garantir un contrôle indépendant des négociations impliquant des intérêts financiers majeurs.

Une présidence fragilisée ?

Cette controverse pourrait avoir des répercussions politiques significatives pour Ursula von der Leyen, alors que son mandat approche de son terme et qu’elle est pressentie pour briguer un second mandat à la tête de la Commission européenne. Si cette affaire ne menace pas immédiatement sa position, elle alimente les critiques sur sa gestion et pourrait peser dans les discussions pour la reconduire ou non.

En outre, cette crise pourrait encourager une réflexion plus large sur la manière dont l'Union européenne fonctionne. Les critiques d’Emily O'Reilly résonnent comme un appel à une réforme profonde des pratiques administratives et politiques de Bruxelles, afin de rapprocher les institutions européennes de leurs citoyens.

En conclusion, l’affaire "Pfizergate" ne se limite pas à une simple querelle administrative : elle illustre les défis structurels auxquels l’Union européenne doit faire face pour préserver sa crédibilité et la confiance qu’elle inspire à ses citoyens. Ursula von der Leyen se trouve aujourd’hui au cœur d’une tourmente dont l’issue pourrait bien redéfinir l’avenir de sa présidence et, plus largement, celui de la gouvernance européenne.

Copyright : Tobias SCHWARZ / AFP